Comment j’ai réalisé que je pouvais émouvoir les gens

Être émotive en tournage

J’ai plein de photos de mes tournages en tant qu’enfant. Celle qui me rend le plus émotive est la photo de ma première journée de tournage sur Mlle C.  Je suis dans le corridor vert de mon bloc appartements, et je suis habillée en vert avec mes petits cheveux mouillés. J’ai mon sac à lunch et je peux encore ressentir ma nervosité et ma fébrilité…  Au tournage, je me suis tout de suite sentie à mon aise, à ma place. 

Il n’y avait pas de coach sur ce film-là, seulement une gardienne qui  s’occupait de nous entre les scènes. C’était uniquement le réalisateur qui s’occupait du jeu d’acteur.  Il était bon, mais un peu sévère. Je pense qu’il était plus habitué à travailler avec des adultes. Moi j’étais très sage et à mon affaire, alors je ne me faisais jamais chicaner parce que j’étais toujours à la bonne place au bon moment . J’ai appris l’importance de cette attitude dès le début. Lors des premières journées de tournages, il y avait beaucoup de scènes émotives. Nous tournions toutes les scènes à l’intérieur de la maison avec Patrick Labbé. C’était des scènes de crises de larmes au téléphone. Je me rappelle qu’à cette époque-là,  l’ami de ma mère, Daniel, que j’aimais beaucoup, avait un cancer et il allait mourir. Pour faire mes scènes émotives, je pensais à sa situation. Cela a été mon premier réflexe. C’est étrange. Je ne sais pas comment cette idée m’est venue. 

Alertes, TVA, réalisation Frédéric d’Amour

Le réalisateur me disait les répliques de ma mère. Il me parlait pendant la prise : « Regarde un peu plus haut, plus bas, respire, enlève le téléphone, etc. » Je devais faire tout ce qu’il me demandait tout en pleurant. On m’avait informé qu’il y avait des gouttes pour faire des larmes, mais ils ne m’en ont jamais mis.

Je me souviens de Micheline, la maquilleuse, que j’aimais beaucoup. Elle était comme une grand-maman pour moi. Je me souviens aussi de la scène à l’hôpital, très émotive aussi.  Je me rappelle qu’elle m’avait prise contre elle et me flattait le bras. Je pensais à l’ami de ma mère qui avait le cancer, tout en me faisant doucement caresser le bras. Ça a déclenché un torrent d’émotions. Ce geste était beau et touchant. 

Après cette scène, où j’avais beaucoup pleuré, j’ai entendu : « Coupez ». J’ai vu la script qui pleurait.  Je lui ai demandé : « Qu’est-ce que tu as ? » Elle m’a répondu : « C’était vraiment triste. » À partir de ce moment,  j’ai commencé à prendre conscience de ce qui fonctionnait quand je jouais.  Je me suis dit « Ah ok, je pense que je fais la bonne affaire… »

De votre côté, avez-vous déjà été ému par le jeu d’un enfant ?

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