Les tournages à Montréal ont été un grand défi

Comme je vous en ai parlé dans l’article précédent, j’ai été appelée en renfort pour aider sur un tournage.

Je dois avouer que j’étais assez nerveuse. Le défi me stimulait, mais selon le portrait que me dépeignait le producteur et le réalisateur, le petit garçon était tout un cas !

Voici quelles ont été mes stratégies pour gagner son affection et en arriver à ce qu’il accepte mon autorité :

Dans un premier temps, je me suis dit qu’il fallait d’abord que l’on se connaisse à l’extérieur du plateau pour en arriver à créer un lien avant le tournage. Comme je savais qu’il aimait les chevaux, je l’ai invité à monter à cheval à mon centre équestre.

J’ai demandé à un de mes anciens élèves (qui est un comédien d’expérience) de m’accompagner au centre équestre et de m’assister dans mon travail de coach. Je lui ai proposé d’agir en tant que stand-in du petit garçon, c’est-à-dire de prendre sa place dans les répétitions et les mécaniques. Ainsi, le temps serait moins long pour mon petit acteur. Mais plus encore, cette stratégie visait à lui donner l’exemple. Comme mon ancien élève a une merveilleuse attitude et beaucoup de compétence en interprétation, je me suis dit que le petit comédien inexpérimenté serait inspiré par mon élève et que s’installerait une émulation naturelle.

La sortie en équitation me permettait de voir comment celui-ci recevait les indications, et quelle était sa réaction quand une adulte lui disait quoi faire. De plus, cela me donnait l’occasion d’entrer en contact avec la mère et de sonder sa capacité à me passer le relais. Les deux enfants se sont entendus à merveille et le petit ne voulait plus partir. Je lui ai alors dit : « Si tu travailles bien pendant le film, je vais te ramener prendre un autre cours. » Ses yeux se sont illuminés.

J’ai proposé à la mère d’aller prendre un café. Je désirais lui montrer des extraits des tournages antérieurs afin qu’elle m’aide à comprendre les réactions négatives de son fils lors des tournages. Très étonnée, elle ne reconnaissait son fils, qui, en temps normal, n’avait jamais ce genre d’attitude négative. Je lui ai demandé si elle accepterait que son fils agisse ainsi avec son professeur et si elle tolérerait un tel comportement. Elle n’était pas très contente de son enfant, il va sans dire. Elle s’est montrée très coopérative et nous avons convenu ensemble qu’elle aurait une franche discussion avec celui-ci.

J’ai aussi invité la mère et l’enfant à visiter le plateau d’une émission de télé jeunesse pour que ceux-ci voient comment fonctionne un tournage et qu’ils constatent à quel point un tournage est sérieux, long et éprouvant et qu’il faut être un « champion » de rigueur et de travail.

Lors de notre première répétition pour les tournages à venir, j’ai, dans un premier temps, voulu être certaine que le petit sache concrètement ce qu’était bien agir sur un plateau. J’ai écrit sur un tableau : « Qu’est-ce qu’un bon comédien ? » Avec l’aide de mon « assistant / stand in », nous avons déterminé, avec des exemples à l’appui, quel est le bon comportement à adopter en tant qu’acteur. Le petit a aussi donné son avis. De par ses réponses et son attitude, j’ai pu constater que sa mère avait eu une franche conversation avec lui.

Je lui ai aussi proposé un tableau de pointage. S’il accumulait 200 points, il aurait la possibilité de prendre un autre cours d’équitation. Après chaque scène, je lui attribuais des collants. À tous moments, si cela n’allait pas à ma guise, je pouvais lui en retirer. Il était très stimulé par cette idée et il y a mis du sien. Il adorait coller lui-même ses collants et compter combien il lui en manquait pour obtenir son « prix ». Il a aussi constaté que dès qu’il tentait l’esquisse d’une mauvaise attitude, j’utilisais la technique « arrêt d’agir », ne lui donnant pas la chance de poursuivre son action. Il a rapidement réalisé que je pouvais démonter ses stratégies et qu’il ne servait à rien de tenter quoi que ce soi avec moi. Avec douceur, amour et fermeté, je l’ai guidé vers la bonne attitude à avoir.

Le plus important dans la réussite de ce « sauvetage » a été l’acceptation de la mère de me faire totalement confiance et de me laisser guider son fils sans intervenir. Elle m’a donné la chance de devenir « l’adulte référant » en me remettant l’autorité nécessaire (comme le fait un parent avec un professeur à l’école).

Lors des tournages, elle était en retrait, travaillant sur ses choses. À ma demande, dès la deuxième journée, elle n’est pas restée sur le plateau. Ainsi, le petit et moi avons pu établir notre propre relation qui s’est reflétée dans le travail. La maman a été la clé de mon succès avec le petit.

Malgré la part de responsabilité du petit dans cette histoire, je dois avouer qu’il y a eu plusieurs choses qui auraient dues être faites autrement. de la part de la production. Il faut se rappeler qu’il ne s’agit pas simplement de choisir un enfant et de le parachuter dans un film sans préparation ni encadrement adéquats. « Le bon marché coûte cher. » En voulant économiser sur le salaire d’un coach/personne ressource, on a fait en sorte que l’enfant ne donne pas la performance attendue. En bout de ligne, les coûts ont été plus élevés en mauvais rendements et en une expérience non satisfaisante pour l’enfant acteur…

J’ai découvert un enfant très attachant et, la la chance que j’ai eue pour que mon « sauvetage » fonctionne est le fait que cet enfant est très intelligent et très mature pour son âge. Ainsi, il a été en mesure d’apprendre à la vitesse grand V et de s’adapter à ce dont on s’attendait de lui. Il s’est révélé être un très grand comédien dans tous les aspects que cela comporte et je suis très fière de lui.

Est-ce que votre enfant a déjà relevé des défis plus grands que nature ?

 

  Article précédent Article suivant